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vendredi, janvier 19, 2007

Previously on Son Alt Sat :

Suite à un pari idiot, SonAltesse Satanissime se retrouve chez un psy.
Après rapide analyse,celui-ci croit détecter une surcharge de travail commençant à peser sur notre héros.
Il s'apprête à lui prescrire un médicament efficace mais s'arrête pour lui annoncer deux mauvaises nouvelles.



-Docteur, quelles sont ces deux mauvaises nouvelles ?

- Et bien tout d'abord,ce médicament, ainsi que moi même et cette situation n'existons pas, il s'agit d'un rêve que vous faites en ce moment.
Deuxièmement, d'après les données sensorielles transmises à votre cerveau, votre réveil a sonné il y a déjà un bon moment et le soleil semble être bien monté dans le ciel.

...

Ouverture instantanée des yeux !
Pas assez de force pour me redresser encore.
Non, je ne peux pas le croire, pas aujourd'hui avec ce que j'ai à faire au taff.
Bon, j'admets que le soleil est effectivement plutôt bien haut, mais les jours sont sensés être rallongés, ça doit être l'explication rationnelle.

Vite, j'appuie sur mon nouveau réveil parlant super intelligent, cadeau de ce Noël, pour en avoir le coeur net :

Salut Trou du cul, il est 9 heures et 21 minutes et tu es bien à la bourre mon con. Ah la la, t'es sacrément dans la merde on dirait.
Finalement un réveil matin un poil plus con aurait préférable.

Je retrouve instantanément la force pour me lever et filer à la salle de bain.

Bon, pas de temps à perdre, listage des étapes à effectuer en temps normal et de ce que je pourrais faire ce matin :
Brosser les dents : pas le temps
épilation : pas le temps
limage des ongles : pas le temps
application des différentes crèmes de soin : pas le temps
douche : ok mais rapide
parfum : à fond pour masquer le reste

Oui, bon, finalement il n'y a rien qui change par rapport aux autres matins habituels.

Habillage rapide avec les premiers vêtements tombés sous la main (avec vérification dans le miroir avant de sortir pour éviter de se retrouver en pantalon de skatteur et chemise hawaïenne au taff).

Petits pas de course pour arriver au boulot et me voilà !

Estimations rapide des dégâts...
Oh, une toute petite heure de retard de rien du tout...

...

et demie...


Bon, tant piche, je vais tenter la technique de rentrer en sifflotant et en balançant un discret "Salut les cons" de courtoisie.

Pas trop de réactions sauf une personne au fond qui se retourne immédiatement et commence à venir dans ma direction.
Cela doit être une coïncidence parce qu'elle se met à courir alors que je ne suis qu'à quelques mètres, aucun intérêt.
Toutefois elle court vraiment vers moi et... saute sur moi ???

Impossible de l'éviter, avantagée par sa grande taille son élan a été ample et son corps me déstabilise, me faisant basculer par terre, le choc étant heureusement amorti par mon crâne qui a au préalable heurté le bureau de l'accueil.

La douleur à la tête disparait soudainement.
Ou plutôt elle est totalement effacée par la douleur à l'épaule infligée par la chef de projet qui m'y mord violemment.

Enlevant ses crocs encore dégoulinant de mon sang frais du matin elle s'adresse à moi d'une voix fluette :
"j'aurais besoin de toi. On a un email à envoyer. On a eu des textes à compléter et pour la créa je pense partir d'un mail envoyé il y a 6 mois pour le projet et qui va être amélioré. Je te transfère tous les éléments et je te rejoins pour fabriquer l'email.

-Hein ? Mais ce n'est pas mon job de faire ça, tu confond tout !

-Je sais, mais je n'ai personne d'autre de disponible aujourd'hui et cet email doit impérativement partir ce soir. Le client y tient plus que tout, c'est une brique fondatrice dans son plan Market Bidonning Strategy High New Media Interface Planning ® !
Je te laisse t'installer, t'envoie tout par mail et passe te voir.

Et comme par enchantement, la voilà qui pour peaufiner le tout me fait son regard mythique travaillé durant toutes ses longues années d'expérience, un regard qui se veut à la fois celui du chat dans Shrek qui dirait "S'il te plaît", d'un enfant qui meurt de faim dans un pays pauvre qui dirait "aide-moi" et de l'employée avec ancienneté qui dit en somme "je connais le patron mieux que toi, alors fais-moi mon email de merde sinon tu peux t'insérer tes perspectives de carrière là où je pense."

Pas le choix, j'ignorais combien de temps ça allait me prendre, mais bon, j'étais fixé sur une partie de ma journée.

Heureuse existe le département marketing !
Certes, il n'est pas le plus important de l'agence, mais au moins voilà des personnes toujours souriantes et qui ignorent tout de l'agressivité.

D'ailleurs en voilà une qui me regarde avec un grand sourire en me voyant approcher
"Votre Altesse ?"

Oui, je sais, dans d'autres lieux, le terme "Maître" est à l'honneur.

-Oui très chère, que puis-je pour toi ?

-Mes statistiques que vous m'aviez promises la semaine dernière, est-ce que vous pourriez me les transmettre ?

-Mais bien entendu, dès que j'arrive à mon poste je m'y attèle immédiatement !

-ok, merci beaucoup.

Oui, c'est salaud d'abuser ainsi, c'est la même phrase que je lui sort chaque matin depuis 10 jours, mais bon, du coup elle est persuadée que je lui traite sa demande et ne me relance que le lendemain.

-Au fait votre Altesse ?

Je me retourne alors que je venais à peine de la dépasser. Elle me tend un polaroïd.

- Qu'est-ce que c'est ?

- Une photo de votre petite amie. Comme j'ai remarqué que vous aviez tendance à m'oublier, je l'ai faite enlever ce matin à son domicile par des hommes de main biélorusses. Si vous ne me fournissez pas mes statistiques avant ce soir, je la fais exécuter.

Pas de doutes, c'était ma dulcinée, belle devant l'éternel malgré la lumière sombre de la cave et les homme cagoulés placés derrière.
Aucun doute sur la date récente de la photo, elle tenait entre les mains le dernier numéro de Jeune et Jolie paru la veille.

Consterné et médusé à l'idée que l'on puisse vouloir du mal à ma chérie, j'avance penaud lorsque, passant devant la porte des toilettes masculines, celle-ci s'ouvre et deux solides mains m'attrapent et m'entrainèrent de force à l'intérieur.

Sur le moment la seule pensée qui me vint à l'esprit fut "Et merde, je vais encore avoir doit à une promotion !".
Grave erreur car voilà en face de moi deux étranges grosses brutes jamais aperçues auparavant.
Derrière eux se trouve l'une des chefs de projet de l'agence.

"Alors, on m'a oublié ?"

Bon, si je voulais jouer mon chieur dans l'absolu, non, je ne l'avais pas tout à fait oubliée puisque tout les soirs avant de partir je repensais à ce que je devais faire pour elle en me disant "et merde" suivi de diverses tergiversations que l'on pourrait au final synthétiser "Bon, tant pis".

"Je me doute que tu es très occupé en ce moment, difficile d'obtenir de toi le boulot pour lequel je te demande dans mes ressources, surtout quand ces petites pétasses jeunettes qui me font concurrence osent venir voler de ton précieux temps en requêtes futiles et chronologiquement dilapidatrices !
Voilà pourquoi, uniquement dans le but de t'aider bien entendu, je vais laisser Ugre, et Grüth postés derrière toi. Ils ont pour mission d'empêcher quiconque de venir te dérager."

Bon, au moins le point positif c'est que les deux autres seront obligées de me lâcher la grappe.

"Au fait, j'oubliais, j'ai négocié avec 2 personnes qui avaient urgement besoin de toi aujourd'hui. Elles auront donc le droit de venir te solliciter durant la journée. Je te laisse t'installer, tes 2 nouveaux copains te rejoindrons dans quelques minutes."

Bon, avec la facilité qu'on démontré les 2 molosses pour me jeter des toilettes j'en déduisais qu'il allait être impossible de négocier quoi que ce soit avec eux et qu'il valait mieux pour moi terminer ce que j'avais à faire sous peine de désagréments non négligeables.

Je n'osais imaginer la suite. En seulement 5 minutes de journée active, j'avais subi 3 agressions, perdu une partie de mon épaule, récupéré plusieurs bleus au niveau de la tête et des bras, et étais complètement dégoutté.

Non, je ne pouvais pas me laisser faire.

Certes, pour les trois personnes qui m'avaient déjà imposé leurs conditions je n'avais pas moyen de m'éclipser, mais il était hors de question que je subisse un quatrième affront.

A peine avais-je formulé cette volonté que surgit devant moi un Freelance bossant occasionnellement chez nous et qui, me pointant de son doigt me lance un "hey toi !"

Non, trop c'est trop ! (Ce qui en soit est logique, puisque c'est trop)

Je ne lui laisse pas le temps de poursuivre son oeuvre de démolition moralistique, la haine m'a submergé et je refuse que l'on me dicte encore ce que j'ai à faire. D'un coup je lui attrape le bras,
le lui tord derrière le bras. Puis lui serre la tête par les cheveux et la lui fracasse à trois reprises sur le bureau, en visant l'angle.

Un silence total s'est fait dans le pôle créa. Tous me fixent avec de grands yeux ébahis, aucun n'ose parler. Le freelance git à mes pieds.

Le silence commence à se faire pesant. Peut-être que si je leur expliquait mon geste ils pourraient comprendre ma réaction et retourner à leur poste, ces fainéants. (ok, ils sont arrivés à l'heure eux, mais ce n'est pas une raison).

"Bah quoi, j'ai déjà eu assez gens qui m'ont refilé du boulot pour ce matin, alors faut plus m'en refourguer. Lui je le sentais gros comme une maison qu'il allait me demander un truc. Pour quelle raison il serait venu me parler sinon, là, maintenant, à mon arrivée, comme de par hasard ?"

Notre chère graphiste, les yeux au bord des larmes et une colère contenue de peu dans la voix me réponds "Mais, pas du tout ! Depuis ce matin il arrête tout le monde pour leur proposer un gâteau pâtissier acheté ce matin. C'était pour fêter la naissance de son fils hier matin".

Effectivement, si l'on considère le paquet que la personne à mes pieds tiens dans sa main (celle du bras que je n'ai pas broyé), l'explication se tient.

Bon, boulette et puis c'est tout, je tacherais de ne plus recommencer.

Je commence à reprendre mon court chemin menant à mon poste lorsque, ne pouvant plus contenir tristesse et colère, notre graphiste hurle "Tu n'as pas l'impression d'oublier quelque-chose après ce que je viens de te dire !"

Quel con, c'est vrai.

Hop, je reviens sur mes pas, me baisse auprès du corps et attrapes l'un des gâteaux appétissants.
Puis repars à mon bureau en croquant dedans et suis agréablement surpris par la saveur qui s'en dégage.

"Huum, c'est délicieux ! Un vrai régal. Vous devriez goûter !"

A priori ce n'était pas vraiment le geste attendu car en arrivant à mon poste j'ai cru entendre un guttural "Abruti !" provenir du lieu où je me situait peu de temps auparavant.


Enfin devant ma bécane, enfin un objet froid, métallique, sans âme, sans menace, bref, sans sources d'emmerdes.

Bouton d'allumage de l'écran pour me logguer et ... tiens, qu'est ce qu'il me dit ?

Les mises à jour automatiques ont planté durant la fermeture de votre session et ont potentiellement endommagé votre disque dur. Veuillez redémarrer votre ordinateur.

Génial, voilà comment bien commencer la journée.

Bon, rester appuyé sur le bouton d'allumage pour l'éteindre à la barbare. Balancer un gros coup de pied en beuglant "machine de merde" et appuyer à nouveau sur le bouton pour que l'ordinateur se relance.
Bref, processus normal.

12 minutes de vérification de l'état des disques plus tard je peux enfin me logguer à mon compte avec succès.

Bon, étape suivante, aller me prendre un café.

Je me retourne, et surprise, mes deux molosses sont déjà devant moi.
-Ah, heu, salut. Vous êtes là plus vite que prévu. Ce n'est pas grave, je vais juste prendre mon café et je vous rejoins.
"Assis" dit le premier.
"Travailler" réplique le deuxième.

-Non, les gars, au moins le café du matin, je ne peux pas passer outre. Après je me mets à bosser.
"Assis" dit le premier.
"Travailler" réplique le deuxième.

-Je crois que vous n'avez pas compris. Je veux mon café et l'aurais. Ce n'est pas ce que vous dites qui va me faire changer d'avis.
"Taper" dit le premier.
"Taper" réplique le deuxième.

-Ah, là en revanche, je ne dis pas, je vais peut-être commencer à travailler.

Bon, tant pis, on va lancer la boite mail pour commencer.
108 nouveaux messages !

...dont 97 d'insultes de la part du pôle créa pour l'incident du matin.

Et encore 12 mails d'insultes reçus en seulement 27 secondes.
Bon, tant pis, on va mettre un filtre pour que ça parte directement à la poubelle.

J'avais éviter les insultes par voie électronique. Bon, en revanche, pour toutes les insultes par vive voix, lorsqu'une personne venait à l'imprimante rien à faire. Bon, encore ce n'était pas grand chose. Ce sont les crachats qui ont été plus durs à supporter.

Trois personnes qui en revanche n'avaient ni insultes ni crachats étaient les trois chef de projet qui se sont alternés tout au long de la journée sur le siège posé sur ma droite.
A peine l'une retournait à son poste que celle concurrente s'y posait immédiatement et me sommait de m'atteler à la tâche que je devais exécuter pour elle.

Bon, comme j'avais le malheur de poser des questions techniques, elle partaient régulièrement à leur poste pour appeler leur client et valider avec lui si le texte qui passait sur deux lignes allait à l'encontre de leur charte graphique.


12H30 – pause déjeuner !
"taper"
"taper"

Ah, bon, bein, pas de pause déjeuner donc.

Heureusement que la veille j'avais pu faire un réapprovisionnement en petits gâteaux diététiques pour me sustenter, certes maigrement.

La pause déjeuner fut productive un certain temps. Seul sans bruits alentours à l'exception des deux molosses et d'un ou deux collègues occupés à essayer de battre leur score au foutu jeu des tourelles.

Mais un repas, aussi frugal soit-il, entraine une phase de digestion.
La concentration baisse, les paupières s'alourdissent, les gestes s'empâtent.

Je luttait contre une phase d'endormissement assez forte.
Caféine, mon corps entier réclamait de cette précieuse substance.

Mais avec les deux armoires qui m'empêchent tout déplacement, impossible de me le permettre.
Arrive justement leur commanditaire.

"Je vois que ça avance bien. Tu dois vouloir un café. Aller, tu as droit à 5 minutes pour aller t'en chercher un. Mais pas une seconde de plus !"

Quoi, que 5 minutes de pause ! Mais c'est inadmissible !
Elle mériterait que je lui balance un procès dans la tronche.
Mais c'est vrai qu'elle a fait des études de juriste. Prudence.©

Bon, pas question de perdre du temps, je cours comme un taré à l'autre bout de l'open space rejoindre la machine à café, me faisant flasher à l'occasion pour excès de vitesse.
(Une mesure instaurée par le pôle créa pour d'obscures raisons de feuilles volantes).

Je m'approche de plus en plus de la sainte relique mais un mauvais pressentiment commence à venir; en effet le moniteur LCD semble afficher un message autre que celui habituel ("Vient d'abreuver de ma dose de drogue, pauvre loque sous emprise de caféine").
Avec l'habitude j'avais appris toutes les correspondances :
OFF 7 : plus de touillettes (m'en fous, j'ai une cuillère sur mon bureau)
OFF 3 : Bug, besoin de ré-initialisation (m'en fous, j'ai juste à la rebrancher)
OFF SHORE : Problème de catcheur blond (m'en fous, ça n'arrive jamais)
OFF 4 : plus de sucre (m'en fous, j'en ai dans ma réserve personnelle)

je suis enfin assez près pour lire le code affiché !

...

DTC 19

...

Et merde, une panne totale et profonde, m'en fous pas de ça.

Me faut un plan B, et vite.

Plan B comme "Bien sûr ! Les capsules de Nespresso !"

Je suis juste à côté de la salle de réunion principale, celle avec la machine à Nespresso et ses myriades de capsules planquées derrière le meuble.
Personne dans la salle parfait.

Je m'approche des énormes cartons remplis à ras-bord.
Couleur rouge.
La couleur de la force, très très bon présage.

Quelque chose de fort, riche en caféine, un coup de fouet pour être éveillé et efficace pour le reste de la journée.
J'en tremble d'avance.
Sortons ce petit condensé de vitalité de son emballage et commençons déjà mentalement à le déguster en lisant son doux petit nom.

...

Décaféiné intense

...

Crotte, c'est pas vrai, qu'est ce que c'est que cette idée d'acheter ce truc !
Du café décaféiné (donc qui ne fait aucun effet) mais intense (donc en plus fort).

Avec un concept aussi con on comprend qu'ils soient obligés de faire appel à Georges Clooney pour nous vendre leur marchandise.
Mais ça ne résout pas mon problème d'avoir besoin de me réveiller.

Me faut un plan B, et vite.

Plan B comme "Bon sang ! Mon café soluble !"

Pour les fois où la machine est en pane et la salle de réunion occupée, un investissement qui s'est révélé maintes fois judicieux et qui semble l'être une fois de plus.

Je m'approche fébrilement de la boite posée sur mon bureau auxiliaire (oui, j'ai besoin de place pour étaler mon bordel composé à 97,2 % d'objets et diverses bricoles totalement inutiles pour mon travail).
Une main sur la partie basse, l'autre sur le large bouchon, un mouvement de poignet et...
et...
[bruit de l'effort humain difficilement retranscrisible par écrit], ce n'est pas possible, quel est le boeuf qui a utilisé le bocal en dernier et qui l'a refermé en le serrant au maximum ?

Je fais appel à mes dernières force sachant que je vais pouvoir les régénérer dès que j'aurais mon foutu café.
Je sens le bouchon commencer à céder tout doucement. Lentement mais surement il se déplace. Je joins un dernier sursaut de force et ...

Noooooooooooooooooooooooooooooooooooon!!!

L'impulsion donnée était trop forte.

Impuissant j'assiste à l'envol du bouchon d'un côté et du bocal de l'autre côté semant au passage tous les précieux grains sur le sol crade.

Toutes ces petites pépites d'éveil dispersées par terre. Impossible de faire quoi que ce soit. Je ne vais pas les lécher quand même ?

Vite, il me faut un foutu dernier plan B avant la fin du temps alloué !

"Assis !"
"Travailler !"

Bon, du coup c'est plan B comme "Baisé !".
Je m'assieds résigné et commence à enchainer.

Les chefs de projet commencent leur ronde autour de moi.
Pas un seul instant je me retrouve seul à mon poste. Parfois j'en ai même deux à mes côtés, l'une assise sur le tabouret, l'autre patiente derrière en attendant le moment de s'y assoir à son tour.

Je ne les écoute même plus, je sais ce que je dois leur faire, inutile de me le rappeler sans cesse.

Je décide d'écouter la radio pour échapper du moins par l'esprit à cette situation intenable.
Première station : "Under pressure" de Queen. Je zappe
Deuxième station "Be your dog" de Iggy Pop. Je zappe.
Troisième station "Bored" de Deftones. J'éteins.

Je m'endors. Très sérieusement. La menace est réelle. Je dois absolument finir ce que j'ai à faire.
Mais sans pouvoir bouger de mon poste...

Soudain l'idée de génie ! La dernière, salvatrice !

J'attrape la boite de guronzan planquée dans mon tiroir. Douze doses, parfait !
Avec une vitesse qui me surprend, je verse le fond d'eau qui me restait dans la boite même du Guronzan et la referme avant même que les pastilles aient le temps de se dissoudre et de devenir effervescentes.
Par précaution j'enroule le bouchon de plusieurs tours de scotch afin d'éviter de mauvaises surprises.

Le timing est extrêmement précieux.

J'attrape une aiguille qui trainait sur mon bureau (vous l'ai dit, il y a un de ces bordels) et réussit à la planter simultanément dans la boite du psychotrope et dans une veine de mon bras.

Devant cette porte de sortie inattendue, le mélange se déverse à une vitesse fulgurante dans mon organisme, m'éraflant au passage une bonne partie du système sanguin.

J'étais soudain boosté aux limites supportables de l'organisme humain.

L'effet d'un rail de Cocaïne d'un kilomètre de long.
L'effet d'un mélange Arrissa/Wasabi/Tabasco/piment de Cayenne de deux kilos avalé d'une traite.
L'effet de cent bonbons menthol extra fort insérés en suppositoire.

Enfin, je ne l'ai jamais fait, mais si ça devais m'arriver je suppose que cela provoquerait les me^mes effets.

Mes mains claquent l'air tellement elles se déplacent vite.

J'abats rapidement les problématiques de statistiques.
Une heure après ce sont les travaux non finis depuis un mois qui se retrouvent entièrement exécutés, me libérant au passage des deux molosses placés derrière moi.

Reste le dernier chantier, ce foutu email sorti de nulle part et sur lequel personne n'arrive à statuer.
Enfin surtout pas la chef de projet qui reviens toutes les heures avec on flot de modifications, quitte à revenir sur des modifications demandées l'heure d'avant.

Elle se décide enfin pour envoyer le fichier email_v12_b_avec_modifs.html et les images associées au client.

Et on attend.

On attend un coup de fil, un mail, un fax ou n'importe quel autre moyen qui permettrait au client de nous faire son retour, qui pourrait se résumer à "ok pour envoi" vu la manière dont ce maudit email a été pensé et repensé, tourné sous toutes les coutures et optimisé jusqu'à l'os.

"Tu comprends, c'est une pièce maitresse de leur stratégie internet, ils leur faut donc prendre le temps pour le valider et s'assurer que cela colle en tous points avec leur communication globale".

Soit, mais nous lui avons envoyé tout de même tous les fichiers plus de deux heures auparavant. Il serait peut-être bon d'avoir de ses nouvelles, vu l'heure avancée de la soirée qu'il était.

"Et si tu l'appelais ?"
"Ah oui, pas bête, je n'y pensais pas."

Oui, le chef de projet pense à de nombreuses choses élaborées, raison pour laquelle il oublie parfois de penser à certains trucs tous cons.

Pour s'assurer une réactivité optimale en cas de modification, l'appel est effectué de mon poste, mon casque avec micro intégré utilisé par ma chère collègue.

Elle attend, obtient enfin le client au téléphone et là, la discussion que je ne peux entendre qu'à moitié m'intrigue.

"Oui bonsoir, je vous appelait pour avoir votre retour sur l'email."
"..." (oui, la téléphonie via IP c'est bien, mais du coup c'est plus difficile pour les autres personnes de suivre ce qui est dit par l'interlocuteur)
"L'email que je vous ai envoyé tout à l'heure, vous l'avez bien reçu ?"
"..."
"Mais si, souvenez-vous, nous en avions discuté ce matin !"

Là ça commence à trop m'intriguer. Je débranche la prise casque, le son se retrouvant immédiatement retransmit sur les hauts-parleurs
"Aaaaah, ok, vous parlez de cet email ? Oui, j'ai vu que vous m'aviez envoyé quelque chose tout à l'heure, mais je n'ai pas eu le temps de regarder, on est occupés sur notre projet vous savez bien. Ca peut attendre demain ou la semaine prochaine même. Je n'ai pas compris pourquoi vous insistiez tant à me l'envoyer aussi vite. Je vous ai dit que l'idée était sympa mais qu'il en fallait pas vous prendre la tête pour ça, nous avons des choses plus importantes à régler en ce moment."

Sourire gêné de ma chef de projet qui me regarde l'espace de 3 dixièmes de seconde et enchaine sur un sprint rapide pour s'éloigner aussi vite que possible de mon ire.

Et c'est là que l'on comprend l'intérêt d'avoir des grandes jambes pour un chef de projet !

Parce qu'à dix centimètres de pattes près, elle n'aurait pas pu s'éloigner autant et je ne l'aurais pas loupé en lui balançant mon écran à la tête.

Et accessoirement je n'aurait pas décapité le stagiaire en webdesign qui se trouvait là.
Dommage, je crois que l'agence vient de perdre quelque-chose sur mon coup de rage.
Quoi que... ce n'était qu'un 19 pouces après tout.

Avant de partir, je m'arrange tout de même pour mettre en place mes vengeances.

Une dose de laxatif dans la bouteille d'eau d'une.
Des crottes de rat dans la boite de thé d'une deuxième.
Et une brique de déchet radioactif dans le siège de la dernière.
(vraiment fou tout ce que je peux trouver dans le bazar placé sur mon bureau).

Une fois rentré chez moi je passe un petit coup de fil à ma chérie que je savais libre depuis la matinée. Elle m'avait envoyé un sms pour me prévenir qu'elle s'était libérée et avait massacré dans d'atroces souffrances ses ravisseurs. Ba quoi ? Faut pas al faire chier ma chérie !

Une fois raccroché je m'allonge dans mon lit pour un repos bien mérité et j'attends.

J'attends...

j'attends...

Forcement, vu ce que je me suis injecté en intraveineuse, je peux encore attendre. Mais tout de même, là ça fait 72 heures que je n'ai même pas cligné de l'oeil !

jeudi, janvier 11, 2007

Combien de temps que j'attends déjà ?

Sûrement pas tant que ça, mettons 5 minutes, mais il me semble qu'une éternité s'est écoulée depuis que la secrétaire m'a demandé de m'allonger sur le canapé en attendant que le docteur arrive.

Foutu pari à la con, quelle idée de miser une séance de psy à la clé.
Et perdre contre une chef de projet en plus, la haine.
Mais bon, je n'en reviens toujours pas de ce que l'on peut cacher dans un corps humain.

Toujours pas là l'autre...
Il doit m'observer depuis une cachette secrète ce con
(Note de l'auteur : oui, une cachette qui n'est pas secrète n'a pas ou peu d'intérêt, j'en conviens).

Je promène mon regard sur son immense bibliothèque rempli de livres divers et variés.
Une grande bibliothèque garnie comme seuls en ont les gens cultivés et désireux de posséder des arcanes de savoir sous forme matérielle.
Une grande bibliothèque avec une grande collection de livres comme seuls des gens fortunés peuvent se le permettre, comme des médecins aux honoraires assez importants j'en déduis.
Une grande bibliothèque avec une grande collection de livres recouvert d'une grande couche de poussière comme seuls des types qui achètent plein de bouquins qui ont l'air intelligents et les exposent pour paraître cultivés peuvent se le permettre.

Ah non, je suis médisant, il y en a trois sur le côté qui ont l'air d'avoir servi récemment :
Ultimatum Sudoku
Elle m'appelait miette de Loana
L'art du Kama-Sutra quand on est tout seul

...

Bon, je suis encore en position de force, je peux me lever sans bruit et me barrer avant qu'il n'arrive.

- Bonjour, désolé pour le retard.

(et merde)

- Ravi de vous rencontrer enfin, vous aviez l'air d'avoir de nombreux points à résoudre lorsque je vous ai eu au téléphone. Je vois que vous êtes bien installé. Je vous propose de commencer tout de suite par me parler de vous.

C'est vrai que parler d'un type que je ne connais pas aurait été un exercice plus difficile. Je commence de manière classique, bref historique avec rappel des dates importantes (Naissance, étapes marquantes de la scolarité, première assiette de haricots de la cantine mangée sans vomir après, première victoire en régionale à Des chiffres et des lettres, première déception avec le refus de ma participation à l'élection de miss France sur des prétextes féministes à la con).

Au bout d'une demie-heure, il m'interrompt, à mon grand regret car j'allais aborder la fois où j'avais terrassé une bande de quinze malfrats à coups de poings. Ok, les rabats-joies me rappellent qu'ils n'avaient que 8 ans pour les plus âgés, mais quand même, ces sales monstres essayaient de piquer mon bonnet de lutin du père Noël !

-Parlez-moi des rêves que vous avez fait dernièrement.

-Il y a quelques jours j'ai rêvé que je mangeais une pomme

- Intéressant. La pomme pourrait symboliser la connaissance, comme symbolisée dans la Genèse. Vous vous voyez vouloir ingurgiter la connaissance pour espérer l'assimiler. Vous complexez d'un savoir dont vous ne disposez pas. Vous ne savez pas comment l'obtenir autrement que par une manière sur une longue durée voir fastidieuse. Vous voir manger une pomme symbolise votre désir insatisfait d'apprendre vite et si possible bien, mais quoi qu'il arrive, vous ne mangerez pas le trognon, et aurez donc la désagréable impression qu'une parcelle du savoir vous échappe.
Un autre rêve ?

-La semaine dernière je me souviens avoir rêvé de moi qui faisait une randonnée en short dans une forêt.

-Passionnant ! La randonnée, on ne peut y voir plus claire interprétation qu'il s'agit là de la manière dont vous symbolisez votre ascension professionnelle. Le fait de vous imaginer en short montre que vous ne vous sentez pas pleinement paré à tout ce qui peut vous arriver et doutez beaucoup de vous même. Vous aimeriez réussir le chemin inconnu que vous commencez, mais vous y allez naïvement et ne préparez pas correctement la manière dont vous pourriez atteindre le haut sommet. Vous considérez le monde du travail comme une épreuve à laquelle vous n'aviez nullement demandé de participer et qui vous est contrainte. Vous aimeriez vous enfuir mais vous n'avez nulle autre possibilité que d'y participer, entouré par une végétation trop oppressante. Vous passez à un stade adulte tout en vous considérant enfant, c'est ainsi que nous pouvons interpréter le fait que vous soyez en short. La forêt qui vous entoure représente quant à elle le monde du travail avec ses animaux qui se cachent et vous guettent comme autant de dangers sur votre parcours.
Passionnant, vraiment passionnant.

(je ne mettais pas son enthousiasme en doute, mais peut-être y croirais-je un peu plus si je n'avais pas grillé qu'au lieu de prendre des notes sur son carnet il faisait une partie de mots fléchés)

-Un dernier rêve ?

-Oui, cette nuit j'ai fait un rêve assez étrange. J'étais en train de marcher dans la rue, alors que le soleil commence à décliner. Soudain je me retourne et je vois que je suis suivi par une dizaine de chiens. Ils ont tous de la bave à la bouche et je constate qu'il regardent vers mon bas ventre. Là je suis surpris de constater que je n'ai ni pantalon ni sous-vêtements, et que mon sexe est remplacée par une longue saucisse de Toulouse. Je commence à courir poursuivi par les chiens affamés qui commencent à me parler avec des vois humaines et hurlent "Arithmétique ! N'oublie pas l'arithmétique". J'ai de plus en plus de mal à courir, mes muscles gonflent au fur et à mesure et mes chaussures se transforment en sandales. Je passe près d'un étang et plonge dedans. L'obscurité règne et je suffoque un peu. Soudain je réalise que l'eau est devenue beaucoup plus claire et salée. L'étang s'est transformé en un immense océan tropical. Je réalise que mon sexe s'est transformé en anguille et j'observe une dizaine de dauphins qui le regardent affamés. Je décide de nager le plus loin possible mais les dauphins me pourchassent. Alors qu'ils sont près de moi et s'apprêtent à fondre droit sur ma personne, un éboulement marin survient et les emporte vers les profondeurs. Là épuisé je ne bouge plus et laisse mon corps remonter à la surface. C'est là que je me suis réveillé.

-Hum...

-Quoi donc docteur ?

-Là dessus je pense que vous étiez juste très fatigué et que vous avez eu un rêve délirant.
Passons à la suite. Je vous avait demandé de faire le point sur votre travail, vous vous souvenez ?

-oui.

-Vous m'avez apporté la liste des points négatifs dans votre vie professionnelle ?

-Oui docteur, c'est le gros carnet noir que j'ai posé sur votre bureau.

-Et vous avez également listé les points positifs ?

-Aussi docteur. C'est le post-it que j'ai posé à côté.

Un rapide survol de mes notes et le doc ouvrit à nouveau la bouche.

-Votre problème est ma foi assez classique. D'après les symptômes, je dirais que vous faites une ralfionite aiguë.

-Aïe, et c'est grave ?

-Pas si traité à temps. Je peux vous prescrire de l'antiralculine, ça devrait calmer es effets.
Malheureusement j'ai deux mauvaises nouvelles pour vous.

-Ah bon, lesquelles ?


A suivre....

La suite dans un prochain épisode !