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lundi, décembre 07, 2015

Monter un meuble, ou l'art d'haïr l'humanité !


L'été avait été stressant, inutile de le cacher.

Des procédures longues ne m'avaient toujours pas permis d'être certain sur mon avenir légal au Canada, j'étais dans le fameux statut implicite, sorte de schrodinger du visa, où l'on autorisé à être sur le pays jusqu'à ce que l'on vous indique que vous n'étiez en fait pas sensé rester.

Une longue série de soirée à s'endormir en se demandant si le lendemain on allait devoir décider de notre départ quelque part ailleurs et dire au revoir aux nombreux amis que l'on s'était fait, aux nombreux lieux que l'on avait découvert, aux nombreuses conq... bon sur ce point au moins pas de regret, mais tout de même, une seule année n'est pas suffisante pour découvrir un pays.

Je ne m'empêchais pas pour autant de vivre, bien au contraire, partant même les fins de semaines tester de nouvelles aventures, comme descendre des rapides en canoë camping ou bien survivre à 24 heures de roller continues. Ces moments d'évasion me provoquaient un sentiment de liberté extrême, même si j'ignore encore si c'était l'exploit sportif en tant que tel, ou juste le fait que j'avais enfin une excellent occasion pour ne pas avoir à me laver pendant 48 heures.

Et soudain, le mail tant attendu arrive: pleurs, vomissements, hurlements, tremblements, mon monde entier s'écroulait. C'était terrible. Bon, dans les faits j'aurais pu m'épargner cet instant pénible si j'avais pris la peine d'ouvrir le mail avant de réagir ainsi, parce que j'avais bien obtenu mon visa.

La vie montréalaise pouvait donc continuer, mais il fallait que je procède à quelques changements, et non des moindres, puisque j'étais sans logement fixe, l'incertitude de l'avenir ayant légèrement impacté mon souhait de me réengager sur un bail.

Parfait, j'allais pourvoir profiter de l'occasion pour me prendre un appartement à moi tout seul, spacieux, bien situé, et dans mon budget !

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Bon, je vais chercher un colloc alors.

Coup de chance, un de mes collègues avec qui je m'entendais bien devait lui aussi trouver un nouvel appart.

"Hey, ça te dit que l'on se mette en collocation toi et moi ?"
"Ouais, pas de soucis, par contre je te préviens, j'ai un chat qui vient avec moi, non négociable."
"Lol, même pas peur, aucun soucis pour moi."

(Note pour plus tard : avoir peur !)

"Autre truc, j'ai déjà mes meubles, donc faut se chercher un appart non meublé."
"Ouais pas de soucis."

Après moult recherches (en fait pas beaucoup, mais ça sonne mieux) nous dénichions enfin la perle rare : grand, moderne, bien situé.

Signature du bail, déménagement un lendemain de cuite (parce que l'on ne va pas commencer à agir intelligemment non plus), je finis d'entreposer toutes mes affaires dans ma chambre et réalise d'un coup quelque-chose...

"Hé mais il n'y a aucun meuble dans ma chambre !"
"Bein oui, c'est un appart non meublé, tu te souviens ?"
"Hein ? C'est ça que ça voulait dire ? Vous faites chier avec vos termes techniques peu explicites locaux, pouvez pas utiliser des termes français utilisés partout ?"
"Heu... Mais quand on a visité l'appart, tu n'as pas réalisé qu'il était vide ?"
"Mec putain, si tu crois que je vais faire attention à tous les détails, tu voulais pas que je vérifie la douche aussi tant que j'y étais ?"

Et deux semaines à me doucher à l'eau brûlante plus tard, je me suis dit qu'en fait vérifier la douche aurait été effectivement une bonne idée.

Bon, heureusement nous avions amené un fauteuil et un grand et large canapé, qui pouvait largement tenir mes presque un mètre quatre-vingt cinq. 

"Fais attention par contre, le chat aime dormir dans le salon et particulièrement dans le canapé."
"Oui bon, c'est pas une petite boule de poils qui va décider d'où je dors ou pas !"

Dès la deuxième nuit à dormir en boule dans le fauteuil, je compris qu'il me fallait absolument investir dans un lit.

Le jeudi soir, un ami m'emmène gracieusement chez un marchand de meubles nordique équipant la quasi totalité des pays modernes, et j'en profite pour acheter lit, matelas et couette, ayant déjà chez moi la housse de couette et les draps de lits, que j'avais gardés de mon précédent appartement. Ce sont d'ailleurs ceux-ci qui ont motivé la taille du lit, s'agissant de draps de taille lit double.

Mon ami me dépose chez moi, mon colloc est de sorti, parfait, je serai tranquille pour assembler mon lit. D'ailleurs je ne vois pas pour quelle raison j'aurais besoin de plus d'une personne pour monter un meuble. (NDLR: Peut-être parce que c'est crissement plus compliqué ostie de cave !)

La notice avait eu la bonté de ne pas m'indiquer le temps estimé par opération, mais après une heure d'efforts, je me doutais que la tête de lit aurait du être montée depuis longtemps. Haletant et perlant de sueur, je me j'observe cette première victoire. étape une sur sept accomplie, je peux procéder à la base du lit. Mais il me faut de la place. Je place la partie montée verticalement, miracle, elle tient debout toute seule, pas besoin de la mettre ailleurs.

Je commence à visser les planches ensemble, assis sur le plancher, quand tout d'un coup, j'entends comme un bruit suspect dans mon dos. Je vois d'un côté un tête de lit chancelante et prête à me tomber dessus, de l'autre une créature à fourrure qui part très vite, ayant compris qu'elle venait de se frotter à quelque-chose qu'elle n'aurait pas dû. La pièce en bois se décide finalement à tomber du mauvais côté, à savoir en ma direction. trop peu de temps pour analyser la situation, je décide de stopper la chute avec la première chose qui me passe par l'esprit : mon pouce !

PUB
Et ça les enfants, c'est la raison pour laquelle vous devez toujours songer à investir des points en INT et DEX lorsque vous créez un nouveau personnage. (l'instant geek vous était présenté jouet club)
FIN DE LA PUB

Rien de cassé heureusement, juste une douleur un peu forte et la honte causée par ce qui était sans le moindre doute la blessure la plus idiote de la soirée. (Note de ceux qui connaissent déjà l'histoire : AH AH).

Un coup de glaçon sur le pouce, et je repars à l'attaque, étape trois en cours, puis quatre et enfin cinq, ma base de lit ressemble enfin à quelque-chose, les contours de la structure sont là, me reste à mettre la partie qui supportera le matelas, la base métallique et les lattes.

La base métallique, vous la connaissez tous si vous avez un lit avec cette marque, c'est celle qui se trouve en plein milieu et équipe tous les modèles depuis des années, faite pour s'adapter à tous leurs lits, facile. Elle vient en version réduite et il suffit de la faire coulisser à la bonne taille, rien de plus simple. J’attrape l’extrémité et tire un grand coup dessus pour l'agrandir.

D'instinct, je sens que quelque-chose ne s'est pas passé comme prévu. Je regarde ma main : horreur, mon petit doigt est scalpé et commence à pisser le sang sur le sol de la pièce. Au moins sept litres de sang s'échappent avant que je ne puisse me rendre à la salle de bain mettre un bandage. (C'est une estimation bien entendu, je n'ai pas non plus pris le temps de vérifier avec des verres mesureurs).

J'arrête tant bien que mal l'écoulement d'hémoglobine avec un astucieux mélange de bandage, d'agrafes et de fer à souder, bien que d'après le chirurgien ce dernier soit potentiellement à l'origine de ma gangrène.

Je parviens à reprendre le contrôle de moi-même, bien qu'encore submergé par une immense colère intérieure. Cette pièce est dangereuse à manipuler, et c'est extrêmement imprudent, que dis-je, inconscient voir même malhonnête de la part du fabricant de ne mettre en garde, à aucun moment, le client que je suis de l'importance d'être précautionneux dans la manipulation de cette pièce !

Alors certes, en leur défense, ils avaient bien pour le coup mis un avertissement dans la notice, pour prévenir du danger. Mais bon, si on se met à lire à l'avance les instructions pour des opérations aussi évidentes, où va le monde ?

Je partage d'ailleurs avec vous la fameuse section de la notice, redécorée pour le coup avec le résultat de ma petite erreur de manipulation.

Mais je n'allais pas me laisser abattre pour autant. Je dormirai sur mon lit ce soir là, c'était sûr et certain !

Je pose la barre métallique de fucking of puta madre de putain di merda sur la base de lit (Oui, l'avantage de parler plein de langues c'est ça permet de varier un peu les insultes) et passe à la dernière étape, les lattes.

Je les sépare, prend la première rangée et la pose sur le lit...

Et elle tombe à terre.

Je la reprend, et la repose, parce que oui, j'aime bien nier l'évidence, et là...

Elle tombe à nouveau à terre.

Je ne comprends pas. Je reprends les lattes, regarde l'étiquette, la relis plusieurs fois, c'est bien des lattes de lit double, pourquoi est-ce qu'elles ne tiennent pas sur ce foutu lit dou...

Un doute me saisi, prendre la boite du lit et réalise que j'avais par erreur pris une base de lit de taille Queen...

Deux options s'offraient à moi, démonter le lit et le faire changer par un lit double, ou bien accepter ma défaite et aller échanger lattes, matelas et racheter du linge de lit à cette nouvelle taille.

Ce deuxième choix fut celui du lendemain. Avec ma main atrophiée  je pus enfin compléter le lit, poser le nouveau matelas et installer drap et couverture.

Enfin j'allais dormir dans un vrai lit ! Cette pensée illumina mon visage pendant que je me brossais les dents, j'en avais bavé mais enfin la vie commençait aller s'annoncer douce.

Je rentre alors dans ma chambre et découvre que le lit est déjà squatté.

La couverture enroulé en boule et les coussins posés contre sa tête, le chat est là, posé confortablement en plein milieu. Il lève les yeux vers moi et me sors :

"Bein quoi ? Tu ne voulais pas dormir dans le canapé ?"

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mardi, mai 26, 2015

Esclave de la technologie ?

Le bruit des chaussures contre l'asphalte était régulier, selon mon expérience cela ne devait plus tarder.

Le son de la musique qui se baisse, ça y est, je vais enfin avoir mes statistiques.

"Tu as enfin atteint les 2 kilomètres et demie, c'est pas beaucoup"
(Rah Bordel, c'est vrai...)

"Ton temps total est de 15 minutes, que de la merde!"
(...à chaque fois j'oublie...)

"Soit une moyenne de 6 minutes par kilomètre, même ma grand mère hémiplégique ferait mieux !"
(... de désinstaller ce putain de module Jean-Pierre Coffe sur mon application de course!)

Évidemment, dans l'honorable but de courir au moins aussi longtemps que les filles inscrites sur l'application, j'allais encore me taper cette pluie d'insultes sur une période équivalente.

Courir, quelle étrange idée !

Je le vois bien dans le regard des gens qui me croisent, ce mélange d'amusement, d'étonnement et de dégoût. Je ne leur en veux pas bien entendu, il y a moins de deux ans j'avais exactement le même. Ça bien entendu c'était avant de connaître le terrible secret. Vous pensiez que tous ces gens s'activaient pour les saines valeurs du sport, la beauté du geste et l'idéal d'un corps athlétique ? Que nenni, le secret réside dans l'étape d'après la course. Une production d'endorphine, douce drogue sécrétée par le corps aux vertus nombreuses.

Vous pensiez avoir affaire avec des gens sains ? Perdu, vous n'êtes entourés que de junkies qui ne s'assument pas !

La course à pied, c'est un long moment de souffrance mentale, de regret et de doute qui s’enchaîne ensuite sur un court moment de plaisir malsain. Bref, l'exact opposé de l'onanisme. Du moins de ce que l'on m'a raconté.

Visage rouge, souffle court, les muscles proche de la paralysie mais le cerveau tourbillonnant dans sa drogue naturelle, je rentre enfin chez moi. Les chats (oui, on en a deux maintenant car un seul ça ne foutait pas assez de bordel) s'enfuient à toute vitesse. Leur manière peu subliminale de me conseiller de prendre une douche.

Mais d'abord, épancher ma soif. Que choisir parmi les choix offerts par le frigo :
- Jus de pomme
- carafe d'eau
- bière

Hum, que choisir... Je sors l'application de suivi des calories. Le principe est on ne peut plus simple : indiquer ce que je mange, voir ce que je peux me permettre ensuite. Grâce au scanner de code barre je peux voir à l'avance ce à quoi j'ai droit.

Une bière ? 150 calories.... ça fait beaucoup, c'est un dixième de ce à quoi j'ai droit.

Le jus de pomme dans ce cas ? 140 calories... Le différentiel avec la bière la rend soudainement le choix plus ambigu.

Ah non j'oubliais, j'avais mangé une tartine de pain le matin même, ce qui me retire quelques centaines de calories autorisées sur la journée.

Mais suis-je bête, je viens de courir pendant une trentaine de minute, ce qui multiplié par la vitesse moyenne et l'orientation de Jupiter me donne droit à un supplément calorique de... Ah ok, j'ai droit à une pomme et 27 petits pois de plus pour la journée.

Je me demande sincèrement si je n'ai pas trouvé l'application la plus déprimante du monde. Même celle qui calculait l'heure de ma mort me semble moins tristoune avec le recul. (Pour ceux que cela intéresse, je suis sensé mourir entre 22 heures et 23 heures, garanti à 100% par l'application mais avec un droit de réserve sur le fuseau horaire)

Bon, on va prendre le verre d'eau par sécurité.

Enfin l'eau chaude bien méritée de la douche. Le temps idéal pour réfléchir à cette situation. Être tout le temps en train d'utiliser son téléphone portable pour noter son activité physique, cette liaison fusionnelle avec cet appareil électronique en devient malsaine et renvoie une mauvaise image de moi. Je sais bien que je ne vais pas changer de suite, mais je dois envisager un changement radical dans les semaines qui arrivent. Oui, c'est cela, je dois me décider à moins utiliser mon téléphone, et m'acheter une Apple Watch à la place !

La soirée se déroule plus tranquillement, du moins jusqu'à ce que je tombe sur un boss coriace à mon jeu vidéo. Las de recommencer le même niveau, j'alterne une série en streaming légal avec des cours de langue sur tablette.

Mais déjà l'heure de se coucher arrive. Un rituel bien rodé, avec brossage de dents, pyjama, mise en charge de tous mes appareils électroniques et mise en position de sommeil. Sans oublier bien entendu de configurer l'application d'analyse de sommeil qui me réveillera au moment le plus propice dans la demie heure précédent mon réveil classique.

Aller, bonne nuit les enfants !

Tiens, un orage au loin ?

Ah non, juste mon ventre.... Foutue application !

jeudi, mars 26, 2015

De l'art de faire la fête par -30°

Enfin le Printemps !

Le 21 Mars qui s'affiche sur le calendrier et ses changements radicaux qu'il apporte :
- Un grand soleil dans le ciel
- La température qui remonte à un étouffant -5 degrés
- Les dernières neiges de Mars qui tombent.

Oui, il s'agit d'un Printemps Québécois, rien à voir avec celui du vieux continent.

Ce qui m'amène à une réflexion souvent entendue lors de mon départ pour la Belle Province :
"Aïe, l'hiver là-bas ça ne rigole pas, tu vas rester calfeutré chez toi plusieurs mois !"

A la remémoration de cette phrase, un rire malicieux remonte le long de ma gorge.

Que nenni! Soit que mal y pense me connaître, l'auteur de la précédente réflexion devrait savoir la philosophie qui m'anime. Ou l'auteure, je ne sais plus. Dans ce cas je répondrais à la donzelle :" Tu devrais savoir par quoi je suis mû, Cocotte !".

En effet, plutôt que de contempler le temps qui passe lentement par la fenêtre du salon, je préfère adopter un style de vie plus proche des états d'esprit Carpe diem, De Brevitate Vitae et autre memento mori, termes classes mais hélas de nos jours remplacés dans la bouche de nos branleurs de jeunes par le terme, certes plus mnémotechnique mais tellement moins glorieux, de YOLO.

Alors attention, car malgré tout, faire la fête l'hiver à Montréal implique quelques précautions. Bein oui, il kaïlle grave sa race quand même (Le lectorat juvénile appréciera cette tentative de se rattraper après avoir tenté de les prendre de haut avec des termes latins glanés depuis Wikipedia).

Tout d'abord, se préparer vestimentairement. Plus adaptée que n'importe où ailleurs, la fameuse technique dite de la couche d'oignon (ainsi nommée  car en général on sent pareil en fin de soirée), indispensable pour survivre. Vous avez déjà été au ski ? C'est un peu la même préparation, sauf qu'il faut avoir l'air d'être habillé normalement afin de rester sexy. Choix primordial, le manteau d'hiver, qui se doit d'être facile à ouvrir (évitez les modèles équipés de casse-tête chinois au niveau de la fermeture éclair) et suffisamment long pour couvrir la couenne, partie vulnérable par excellence, lorsque vous vous penchez en avant (pour refaire vos lacets par exemple, bande de pervers).

Tout pièce vestimentaire se retrouve d'ailleurs doublée. Vos chaussettes passent de une à deux paires, vos t-shirt auront obligatoirement des manches longues, votre cache oreille pourra être aussi moche que vous le voulez car caché par un bonnet et votre pantalon sera espacé de votre peau par un long John ! (Oui, un collant quoi, mais ça fait plus viril comme terme).

Mais avant d'enfiler les bottes, un échauffement s'impose.

Car les soirées festives en plein air ont beau être chaleureuses, il n'en reste pas moins qu'à certains extrêmes de température, le mental doit être lui aussi travaillé.

Sur ce point, comptez sur un groupe d'amis vaillant prêt à partager lui aussi l'aventure. Ajoutez à cela un ingrédient magique, peu connu mais aux fortes propriétés de résistance au froid, j'ai nommé l'alcool ! Bon, certes, des esprits chagrins de la communauté scientifique objecteront que non, l'alcool ne permet pas de résister au froid et au contraire serait même contre-productif, mais bon, qu'est-ce qu'ils y connaissent ces rabat-joie, avec leur expérimentations et leur années d'étude ?

D'ailleurs, si les moult breuvages ne suffisent pas à trouver l'énergie pour sortir, un petit bijou de technologie teutonne sera du plus bel effet, j'ai nommé le Jager master! Boisson à base d'herbes, elle peut paraître déroutante au premier abord, dégoûtante au deuxième et détestable au troisième, mais bon, ça c'est une réflexion de personne sobre, à ce niveau de la soirée vous devriez plus trop vous soucier de ce que vous ingurgitez. D'ailleurs, si jamais des participants refusent leur shot, respectez leur choix, puis forcez-les à boire, car il ne faut pas déconner : Un Jager comme à la guerre.

Concernant les soirées même, je vous aurais bien donné plus de détails sur leur déroulement, mais pour cela il faudrait que je m'en souvienne. Seules les marques du lendemain apportent quelques indices : bleus sur le corps, morsures, tickets de caisse du fast food et peau abîmée par le froid (toujours prendre soin à bien étaler la graisse de phoque partout sur le visage avant de sortir).

Enfin bon, l'hiver fini, ça ne sera plus la même chose.

Commence bientôt la période ô combien sage de l'été et de ses barbecues, de ses bières dégustées en terrasse et de ses festivals. D'un ennui...

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lundi, mars 16, 2015

Faites des chats qu'ils disaient !

Et oui, il s'agissait bien d'un chat, navré pour ceux qui au post précédent s'imaginaient un article complet sur la touffe de poils qui se coince dans le nombril.

Miaou

C'est à peu près la seule parole que daigne me dire ce mammifère, ce qui n'a pas facilité ma cohabitation avec cet animal, confirmant encore une fois l'importance de la communication. C'est donc par de l'expression non verbale et une rigoureuse observation de ses rites et comportements que j'ai fini par comprendre le fonctionnement et les rites de cette étrange créature : le chat !

Thèse : Acrobate de nature à l'esprit bipolaire, le chat est un prédateur redoutable, tant pour l'homme que pour ses biens matériels.

Sa présence est constante, que vous la souhaitiez ou non. Disposant de mouvements silencieux à faire rêver tout apprenti ninja, le chat saura apparaîtra là où vous l'attendez le moins. Vous l'aviez vu il y a deux secondes dans la salle de bain ? Tournez-vous, il est juste derrière vous.

Vivre avec un chat requiert donc une extrême attention. La moindre enjambée ou porte à refermer peut se transformer en occasion de le cogner par inadvertance. Bref, le chat est toujours dans le passage ! Attention, cette raison ne s'applique que pour les chats. Si vous essayez d'utiliser cette excuse pour justifier les bleus sur vos enfants ou votre femme, c'est une situation différente: c'est juste que vous êtes un gros connard qui bat sa famille!

L'agilité du félin, bien que légendaire, ne cessera de vous surprendre. Regardez autour de vous, que voyez-vous ? Une pièce classique dans laquelle vous viviez jusqu'à présent sans problèmes ? Regardez à nouveau la même pièce après avoir adopté cet aventurier à 4 pattes. Bingo, vous ne verrez que des choses fragiles et des accidents potentiels. Autant un enfant en bas âge ferait attention et comprendrait bien vite ce qu'il ne doit pas toucher (note pour les lecteurs, je n'ai pas d'enfant), autant un animal c'est différent.

Mû par un désir d'atteindre le coin le plus inaccessible, et grâce à l'accord secret entre le lobby des chats et les équipementiers en décoration intérieure, chaque cadre photo, vaisselle, meuble et autres possessions peut finir son existence plus prématurément que vous ne l'aviez imaginé.

D'ailleurs, ne cherchez pas à lui imposer de limites, le chat n'en a cure et se permettra d'aller où il veut et quand il le veut, vaquant où bon lui semble jusqu'à ce qu'il trouve enfin un endroit confortable où se poser. A une nuance près : la notion de confortable pour un minou diffère de celle pour un humain. Exemple typique, la glotte, sensible à toute pression qui serait susceptible d'engendrer rapidement une sensation de gêne, fera un parfait coussin sur lequel s'assoupir.

Alors évidemment, comme c'est trognon puissance mimi un chat qui dort, on le laisse faire. On savoure cet instant de répit et on s'émerveille en voyant l'animal ouvrir lentement ses yeux, bailler et s'étirer, se demandant quelle délicate attention il va nous apporter après avoir partagé son sommeil sur nous. Ne cherchez pas, neuf fois sur dix, cela se terminera par un coup de griffe ou par une morsure.

Oui, le chat est un animal extrêmement bipolaire. Ses humeurs passent d'un état à son opposé en un éclair de seconde. Expression d'ailleurs que certains auront sans doutes entendue, le fameux "quart d'heure de folie". Il se trouve que cette formule populaire omet un élément à prendre en compte, et non des moindres, est que ce fameux quart d'heure se manifeste une fois par heure. Au minimum !

Fonçant d'un coin à l'autre de la pièce,  sautant sur tout ce qui bouge tout en évitant soigneusement des choses invisibles qui pourtant doivent bien être là sinon il ne les auraient pas évitées (les possesseurs de chat comprendre), le félin fera invariablement quelques arrêts sur vous afin de jouer avec sa matière préférée : votre peau !

Signe visible de cohabitation avec les chats, moult griffures habilleront magnifiquement vos mains et vos avant-bras. Certes moins classieuses que les signes cachés des francs-maçons, cela vous permettra toutefois de vous reconnaître entre maîtres de chats, un petit regard explicite envers les cicatrices et discret "vous en êtes ?" dissipant les éventuels doutes subsistants.

Les  mains et les bras sont pieds entendu les zones les plus courantes car les plus exposées, mais votre corps entier pourra à l'occasion être leur terrain de jeu. Celui partageant mon appartement n'hésite ainsi pas à monter jusqu'à mes épaules à la seule force de ses griffes aiguisées. Plus marqué qu'une planche à découper, mon dos et mon cou sont ainsi balafrés de striures sanguinolentes. Impossible à cacher, elles sont une preuve parfaite de ma soumission à l'animal ! Enfin, j'espère au moins que mes collègues s'imagineront que j'ai une vie sexuelle trépidante.

Bref, vous l'aurez compris, ne vous y méprenez pas malgré la propagande sur Internet, le chat est une créature démoniaque dont il vous faut à tout prix vous éloigner !

Sur ce je vous laisse, je retourne pouponner ma petite boule poilue d'amour.

Vient là le chat !

jeudi, mars 05, 2015

Un long sommeil qui se termine...

Un goût pâteux dans la bouche. Désagréable même.

La langue sèche qui peine à bouger, d'ailleurs les parois buccales ne l'y invitent guère, tant elles semblent avoir été abandonnées de salive depuis longtemps.

"Votre Altesse ?"

Hum, une voix qui résonne du monde réel, ce n'est pas bon signe.

"Votre Altesse, êtes-vous enfin réveillée ?"

Le suis-je ? J'y ai cru plusieurs fois, mais il semble bien que cette fois-ci Morphée ait décidé de me quitter pour un autre.

J'essaye d'étirer le plus de muscles possibles et inimaginables avant de m'attaquer à la tâche la plus difficile, celle d'ouvrir mes yeux. Ceux-ci sont tellement encombrés de croûtes que l'aide de mes doigts est impératif. Foutu corps humain.

La lumière vive qui m'assaille me fait aussitôt occilum regretter mon choix.

"Votre Altesse, il faut se réveiller, on vous attend !"

Mes yeux reprennent enfin leur fonctionnement normal. Mais personne dans la chambre. Chambre qui d'ailleurs ne m'est pas familière. Ai-je été chanceux ?

"Non, vous n'êtes plus dans le  monde des rêves, c'est bien votre chambre et vous êtes bien tout seul."

Ça m'aurait étonné... Où suis-je bordel ? Et qui est cette voix ?

"Je suis votre conscience rédactionnelle, celle que vous avez ignorée depuis si longtemps ! Quand à votre emplacement, c'est votre chambre à Montréal, au Québec, où vous résidez maintenant."

Câlisse, de quoi que tu me causes ? T'essayes de me niaser ?

"Bein non, voyez par vous même."

En effet...

Trop de changements semblent avoir eu lieu. Un bref état des lieux s'impose. Je vois que mon hôte humain se laisse moins aller, c'est déjà ça, par contre j'ai du retard à rattraper de mon côté. Ces changements impliquent de nouvelles aventures. Je me demande bien par quoi je vais commencer. D'ailleurs, qu'est-ce que c'est que cette boule de poils sur le plancher ?

"Ah ça, je crois bien que c'est le sujet de votre prochain article !"


dimanche, novembre 18, 2012

Engagez-vous qu'ils disaient

"4 !"

"Bon sang, je ne vais pas y arriver !"

"3 !"

"Aller un effort, on y est presque !"

"2 !"

"C'est trop dur !"
"Tiens bon on y est, c'est la dernière là"

"1 !"

"On l'a fait, on a réussi, on a tenu bon jusqu'au..."

"Aller on enchaine, vous me refaites 8 pompes de plus !"

"Ah nooooon"

"LA FERME BANDE DE LOPETTE OU JE VOUS TABASSE ENCORE AVEC LES BALLES DE 5 KILOS ! Allez, 8 !"


Ca, c'était ma réalité, deux fois par semaine, depuis quelques mois.

C'est l'un des avantages de travailler dans une grosse boite américaine qui souhaite prendre soin le plus possible des ses employés, c'est d'avoir accès à de nombreux bénéfices en permanence.

Le problème, c'est que parmi ces avantages se trouvent de nombreuses sucreries et autres douceurs caloriques qui par un mécanisme encore non expliqué se retrouvent tout d'un coup dans les mains des personnes passant à côté des étagères. Ne sachant que faire, l'employé a alors le choix entre être avisé et reposer délicatement la barre chocolatée dans son panier ou bien la garder dans sa main et l'amener avec soi au bureau. Hélas, le temps de prendre une sage décision, la sucrerie est déjà ingurgitée, seuls un paquet vide et quelques traces aux bord des babines  témoignent encore de l'existence de la gourmandise dans notre triste monde.

N'étant bien entendu pas le seul employé dans ce cas et après 3 décès de diabétiques, la direction a donc du prendre des mesures adéquates.

C'est ainsi qu'un beau jour de printemps irlandais (il n'avais plus que trois heures d'affilé ce jour là), le comité Santé et Bien-être eu le plaisir de réunir l'ensemble des employés (du moins ceux qui arrivaient encore à se lever de leur chaise). S'en suivi un petit film d'animation montrant les risques cardio-vasculaires lié au manque d'exercice et l'importante d'une alimentation saine et équilibrée.

Le film était ensuite suivi d'un série de témoignages auxquels hélas je n'ai pas tout compris,  gêné par le bruit des gens mastiquant leurs chips au vinaigre puisés dans la cuisinette avant de se ramener à la réunion.

Fin de la séquence projetée, les lumières qui se rallument, de nombreuses paupières qui se rouvrent.

"Vous l'avez compris, notre société fera tout pour empêcher que cela ne vous arrive. Nous avons donc décidé de financer des classes de gymnastique, deux fois par semaine !"

Déclaration exaltante, accueillie par un tonnerre d'applaudissements, vite recouverts eux même par une détonation provoquée par des feux d'artifices de 15 minutes, dont le budget repoussera tout projet de crèche sur au moins deux ans et qui ont malheureusement provoqué le décès de deux personnes supplémentaires brûlées par des fusées mal réglées.

Une semaine plus tard, l'exaltation était toujours présente pour le premier cour qui devait avoir lieu le soir. Mais bizarrement je n'étais pas motivé. Non, au fond de moi résonnait cette petite voix qui me disait "Mais enfin, t'es un branleur, tu te vois vraiment faire de l'exercice toi ?"

Elle n'avait pas tort cette petite voix.

Mais y aller aurait l'avantage d'enfin réaliser une des résolutions de bonne année, me donnait l'avantage de ne pas représenter la même feuille pour la cinquième année consécutive.

Mes collègues commençaient à se préparer, mais je n'arrivais toujours pas à me décider, l'appel de la console assis sur la canap étant très très fort.

"Tu ne viens pas ?" me demande mon voisin.

"Bof, pas sûr, je ne sais pas si ça vaut le coup."

"C'est gratuit, c'est juste après le taff et c'est juste à l'étage du dessus, tu abuses, il te faut quoi de plus ?"

"Je ne sais pas, mais je ne vois pas trop ce qui me motiverait là."

"Ouais bein mon vieux je ne peux rien pour toi. Bon, je te laisse, je vais rejoindre les blondinettes nordiques du 4° qui y sont déjà mais je passe chercher la turque du 2° avant parce qu'il faut que..."

Tente deux secondes plus tard j'étais au dernier étage, en tenue de sport, en train de m'échauffer.

Arrive le prof de sport qui nous explique que c'est une grande première pour lui, d'entrainer des gens qui sont dans notre état physique déplorable et que du coup il va y aller mollo pour l première session.

J'ignore ce qui s'est passé durant cette première session, je sais juste que j'ai été réveillé par la femme de ménage qui m'a retrouvé allongé dans l'incapacité de bouger avec sept autres personnes dans mon cas. Que cette femme et sa patience soit louée pour avoir pris le temps de nous trainer jusqu'à l'ascenseur et nous jeter ensuite dans le premier taxi qui passait à proximité.

Le lendemain matin fût une expérience inhabituelle. Je répétais les même gestes qu'habituellement, mais ceux-ci étaient beaucoup plus lents et surtout, extrêmement douloureux.

C'est d'ailleurs dans ce genre de situation que l'on se rend compte de grandes injustices, comme la hauteur à laquelle sont placés les boutons d'ascenseur, la force nécessaire pour ouvrir une porte ou bien encore l'absurdité que relève le badge, ce fameux sésame qu'il vous faut porter à hauteur de poitrine pour ouvrir l'accès à votre département.

Évidemment impossible de s'en plaindre sous peine de s'entendre dire :
"Ça ira mieux après la deuxième session, c'est normal au début quand on ne fait pas d'exercice on ressent quelques légères courbatures".

Courbatures auxquelles ce collègue doit sa vie sauve, car si j'en avais eu les capacités je l'aurais sans doute étranglé. Hélas là encore, le cou était situé hors de portée...

Malgré ce premier épisode fort peu glorieux et pour des raisons que j'ignore encore (masochisme diront certains, voyeurisme diront certaines), la tentation a été grande et à ma grande surprise je me suis rendu à la deuxième session.

Et là miracle, toutes mes douleurs avaient disparu !

Le lendemain matin, rebelote, impossible de bouger.

Et bizarrement, à chaque session je me suis représenté, avide de découvrir de nouveaux muscles dont j'ignorais la présence jusqu'ici, grâce à ces douleurs musculaires déclenchées dans mes bras, mes jambes et même, oh sacré Graal de l'apparence, dans mes abdominaux ! Qui hélas demeurent planqués sous une épaisse couche de graisse, mais de savoir leur présence m'a ému et m'a même fait pleurer de joie, la première fois.

Et j'en suis même arrivé après quelques semaines à noter une amélioration de mon apparence, un affinement, certes léger mais notable à mes yeux, lorsque je me regarde nu dans le miroir pendant de longues minutes. Enfin, j'ai du arrêter depuis, car les autres collègues qui passaient aux toilettes se sont plaint.

Il ne reste plus qu'à voir combien de temps je garderai ma motivation et si je vais bien réussir à avoir enfin une liste de bonnes résolutions modifiée dans un mois et demi.


Allez, je vous laisse, je vais me prendre un bain de glaçons pour calmer la douleur de la dernirèe session.

dimanche, juin 17, 2012

A la recherche du meuble parfait chez les nordiques


Le temps, cette notion insaisissable qui ne se réalise qu'après coup.

Alors que j'essayais de méditer sur cette phrase belle comme du Marc Lévy, tranquillement avachi sur mon canapé en attendant que mon jeu vidéo se charge, je vis ma copine s'avancer lentement, regarder autour d'elle, retourner dans la chambre, revenir, refaire une inspection à 360° digne d'un Terminator en dernière année d'apprentissage et finalement s'interposer entre moi et la télé.

Mon sixième sens, en alerte, me prévint tout de suite : "Attention, elle va te casser les couilles !"

Oui, à défaut des gestes qui feraient plaisir ou des tâches ménagères dont il aurait fallut s'occuper, c'est au moins quelque-chose que nous les mâles détectons en général assez bien.

Hélas, pas le temps de se mettre sur la défensive, la voici m'attaquant immédiatement :
"Il nous faut des meubles !"

"Mais non mon petit sac de croquettes saveur miel et amandes, pas besoin regarde, mon gros cul est posé sur un canapé et si je ne me trompe pas, derrière toi se trouve un meuble qui est parfait pour poser la console et la télé. Pousse-toi pour voir ?"

Hélas, la ruse trop évidente ne parût pas fonctionner.

"Non, il nous faut absolument des nouveaux meubles. Dans l'entrée il nous faut absolument de quoi poser nos affaires, sans oublier pour les chaussures et puis on manque de chaises. Sans oublier aussi bla bla bla bla bla...".

Oui, à ce niveau là j'avais déjà décroché en sachant que je ne pourrais en aucun cas lutter et que étant donné que tous les marchands de meubles avaient fermé depuis l'arrivée d'une grosse enseigne mondialisée, il ne nous restait comme seule solution que d'aller chez celle-ci.

Dommage pourtant, comme je regrettais faire les vitrines et m'esclaffer devant les fauteuils à 8000 euros et les canapés à 15000.

"bon, pour te motiver je te paye le déjeuner dans la cafet."

Diantre, que je déteste que l'on connaisse si bien mes points faibles...

Le temps de me faire cette réflexion, je réalise que j'étais déjà dans le bus, en direction de ce merveilleux monde magique qu'est Ikea.

Oui, Ikea n'est jamais en centre-ville ou autre point facile d'accès, il faut toujours trouver un moyen de locomotion à roues pour s'y rendre.

Toutefois surprise agréable, le trajet de bus a été enfin modifié pour ne plus passer par la cité en ruine dans le quartier le plus miteux de la capitale Irlandaise. Je sais, vous pensez que j'exagère et pourtant non, mon dernier passage prêt de ce bâtiment en ruine et habité (oui, les deux à la fois pourquoi ?) avait provoqué un sentiment entre la peur de me faire agresser et le désir d'en finir avec ma vie, comme un concentré de mauvais karma délicatement posé dans ce coin reculé de misère.

C'est dire si les petits pavillons mitoyens et clonés les uns aux autres me paraissaient d'une affolante gaieté ce jour là.

Arrivés à destination, course à la première étape de notre périple : la cafet.

Originale idée comme me le confirme la queue de 700 personnes devant moi, mais hors de question de partir dans les rayons, le coup classique étant de se perdre ensuite dans les rayons et de ne plus avoir envie de manger mais seulement de rentrer sain et sauf.

Mon mal en patience et dix-sept heures plus tard (neuf minutes et trente-deux secondes soi-disant d'après ma montre, mais vu qu'elle n'était pas soumise aux trois gamins hurleurs et agités qui étaient devant moi, je mets en doute la fiabilité de cette donnée), me voici enfin au comptoir tant attendu.

"Bonjour monsieur, combien de boulettes de viande souhaitez-vous ? Dix, Quinze ou Vingt ?"
"Deux cents"
"Je suis désolé, je crois que vous ne m'avez pas compris, vous pouvez choisir entre dix, quinze et..."
"J'ai dis deux cents !"
"Mais enfin monsieur, on ne peux pas..."
"DEUX CEEEEEEEEENTS!" éructais-je en émettant également trois litres de salive.

Silence pesant de quelques secondes jusqu'à ce que faisant enfin preuve de bonne volonté la personne se décide enfin à me servir d'une magnifique assiette de cinq kilos.

La bouche remplie de viande, sauce et confiture de je ne sais quelles délicieuses baies, j'écoutais apaisé ma copine énumérer tous les objets repérés dans le catalogue récupéré à l'entrée.

La liste est longue et je comprend donc que cela ne sers à rien de rester trop longtemps. Le temps de jeter les 180 boulettes restantes de mon assiette (finalement vingt auraient été largement suffisantes pour me substanter) me voici d'attaque pour ce qui allait me pourrir le restant de l'après-midi.

Bon, chez Ikea c'est simple, il y a un chemin. Un seul oui, c'est tout.

Alors je sais, de soi disant raccourcis existent, nous y reviendront plus tard, mais quel intérêt comme le dit ma compagne, on risquerait de louper des affaires.

Après une première heure passée à s'assoir dans tous les canapés et s'allonger dans tout les lits, opération des plus inutiles vu que l'on a déjà un lit et deux canapés, nous voici enfin dans une section plus à même de m'intéresser, la section cuisine.

Voir tous ces accessoires et imaginer les milliers de recettes possibles réveillèrent en moins un soudain appétit, n'ayant en effet pas mangé depuis au moins une heure.

Me rappelant la présence d'un snack à la sortie, j'ai donc tenté de presser ma copine qui évidement redoublait de résistance et insistant d'un sombre "Mais attend, je n'ai pas tout vu encore" me faisant comprendre que cela ne servait à rien de se presser.

J'ai donc passé le restant du premier étage à marcher lentement sur cette large allée à la recherche d'un petit c.. pardon d'un objet utile sur lequel poser mon regard.

En fait le plus problématique est de faire attention devant soi. Je ne sais pas si vous avez remarqué, mais il faut toujours qu'il y ai une personne qui fait le chemin en sens inverse. A intervalle régulier vous serez toujours confronté à un connard en contre-sens qui s'estime dans son droit le plus parfait de de vous faire dévier de votre chemin, tel un obstacle minable d'un jeu vidéo des années 90, tout en ayant l'air pressé et bien entendu agacé si jamais vous prenez trop de temps pour vous écarter.

"Cher journal, le temps est pour moi une notion abstraite maintenant, j'ignore si je suis ici depuis des mois voir même des années. A la personne qui lira les lignes suivantes, je la prie de délivrer ce message à ma famille, lui dire qu'elle..."


"Qu'est-ce que tu fais ?" me demande soudain ma copine, m'interrompant à moitié de mon rêve à yeux ouverts sur un tabouret pour enfant à demi avachi sur un bureau avec 18 tiroirs à ressort.

"Rien rien, j'essayais d'écrire le nom du meuble sans regarder pour voir si j'avais bonne mémoire."

(note pour plus tard, ne pas dessiner de gros phallus sur un papier rend toujours ce genre de mensonge plus crédible)

"J'ai vu des accessoires de rangement pour la cuisine dans le catalogue mais je ne les trouve pas ?"

"Bah ce n'est pas grave, ils sont surement dans le coin cuisine de l'étage à merdier, au rez de chaussée." lui dis-je.

"Oui sans doute..."

Je l'ignorais encore, mais j'allais regretter cette affirmation plus tard...

Passés les rayons salle de bain, bureau et rangements, dernière ligne droit en passant par le rayon enfants. Là hurlements, pleurs, roulage par terre, menace de quitter la maison, mais rien à faire, je comprends que l'on achètera pas la peluche brocoli et que donc ça ne sert à rien d'insister.

Arrive alors cette étape plus effrayante qu'une douane d'aéroport : les escaliers !

Car passer les escaliers signifie une seule chose, que l'on arrive au terrible rez-de-chaussée, le temple des accessoires qui se jettent dans votre sac jaune tous seuls, de la bricole à bas prix qui ne sert à rien, mais on ne sait jamais donc que vous devez prendre, bref, l'enfer absolu du porte monnaie.

Comble du cynisme, des chariots sont disponibles pour vous aider à transporter encore plus de babioles, ce qui tombait bien, ayant oublié mon bras bionique à l'appartement.

Première section, cuisine ! Au moins on pourra prendre les accessoires de rangement pour apaiser ma douce. Double voir triple traversée de chaque rayon, avec à chaque fois de nouveaux achats qui tombent pile dans le sac de courses.

Je décide d'interrompre cet massacre de carte bancaire au plus vite.

"C'est pas grave mon poussin sauce béchamel, ça doit se trouver plus loin, avec les cartons de meubles, sinon on l'aurait déjà vu ton bidule !"

C'est beau un homme qui ment tout en sachant qu'il va délibérément à sa perte.

Coussins, luminaires, salle de bain, déco et même plantes d'intérieur, les sections s'enchainent et mon chariot avance de plus en plus lentement, alourdi par le poids incrémental qui accompagne chaque avancée vers la sortie.

Arrive enfin la section meubles sous carton, les fameux oeufs kinder géant où la moindre lettre erronée lors de la prise de note à l'étage du dessous peut transformer une ravissante table basse en placard à balais. Mais ça, c'est la surprise une fois rentrés.

"Bon, je ne vois pas les rangements pour la cuisine, où sont-ils ?"

"On les a peut-être loupés, tant pis, on a déjà assez de babioles, on peut rentrer, non ?"

Ce sera non en effet, je le savais pertinemment et il faut absolument que quelqu'un retourne chercher ces foutus rangements pour cuisine.

Sachant que la faute est partagée, c'est donc forcement de ma faute, donc c'est à moi d'aller les rechercher.

Un coup d'oeil sur le plan interactif, un autre sur la carte au mur, je repère les raccourcis et je me lance.

Plantes, déco, j'arrive aux luminaires...

Hum, n'aurais-je pas du passer un raccourci déjà ?

Tant pis, je continue prenant les petites allées pour éviter l'allée principale et son flot ininterrompu d'acheteurs. L'inconvénient est que cela prend plus de temps.

Péniblement j'arrive enfin à la section salle de bain. Un doute surgit, ne devrais-je pas voir un raccourci quelque part ?

Impossible à trouver, je passe à tâtons tous les murs, rien ne semble pouvoir me laisser passer à travers, à mois de courir très fort dedans, mais le magasin est fait de telle sorte que je ne pourrais jamais prendre assez d'élan. Ni de cerf ou de renne d'ailleurs.

(la direction d'Ikea a tenu à préciser les lecteurs de Son Altesse Satanissime que contrairement aux propos tenus dans le jeu de mot foireux de l'auteur, il est tout à fait possible de se procurer du renne sous forme de pâté, saucisse et confiserie à la boutique alimentaire du magasin)

J'escalade à présent un mur de coussin pour tenter d'avancer plus vite. Je tente un grand saut et me ramasse péniblement dans une pile d'assiettes et verres colorés. C'est bon signe, je suis arrivé à la section cuisine, mais celle du rez de chaussée, or il me faut atteindre celle du premier étage.

zig zag dans les escaliers pour éviter les gamins, arrivé à l'étage, je dois courir le plus vite possible à la section cuisine.

Certes ce serait beaucoup plus simple je pouvais trouver CE PUTAIN DE RACCOURCI !

Oups, je m'aperçois que je viens de crier au lieu de penser, ce qui évidement a effrayé 17 gamins qui en une formidable réaction en chaîne se mettent tous à pleurer. Je pars au plus vite sous une pluie de projectiles. Heureusement nous étions toujours dans la section jouets pour enfant et les peluches qui m'atteignent ne me font aucun mal. La lampe de chevet qui m'atteint à la tête en revanche est beaucoup plus douloureuse.

Sonné, je déambule dans l'allée principale, à coups de "pardon", "désolé", "poussez-vous madame", "Bonjour, mademoiselle, vous êtes seule ?" et autre formules de politesse.

Soudain la terrible révélation... Tous ces gens dans leur bon droit chemin et moi en sens inverse qui les gêne... Horreur et damnation... Je suis le connard en sens inverse.

L'impression de me prendre un coup sur la tête suit cette découverte. Sans doute aidé par le fait que des parents qui m'avaient suivi m'aient balancé un tabouret en bois massif sur le crâne.

Je m'effondre, pleurant, et reste recroquevillé et sanglotant dans mon sang dans le creux d'un bureau imitation chêne. comble de l'horreur, aucune jeunette en mini-jupe ne viens s'asseoir pour essayer le bureau. Ma vie est foutue, je suis devenu cet empêcheur d'avancer tranquillement dans une allée Ikea, l'être le plus détestable au monde après un conducteur de bus irlandais et un chauffeur de taxi parisien.

Un texto "Tu es où bordel ???" me ramène à la réalité. Non, j'ai une mission à accomplir, je dois me reprendre. Et surtout quelqu'un m'attend, quelqu'un que je ne peux décevoir, que le destin exige de me voir en face. Oui je parle bien du vendeur du snack à la sortie, pourquoi ?

Je me relève péniblement et continue mon chemin jusqu'à la section cuisine. Une recherche laborieuse me permet de comprendre l'erreur du début. Les rangements pour la cuisine étaient injustement cachés, enfin, ils étaient de l'autre côté du rayon, ce qui revient au même.

Combien en fallait-il déjà ? Misère, j'ai oublié le nombre magique, est-ce deux ou quatre ? Dans le doute j'en embarque 17, chiffre rond et divisible par excellence. A priori c'est donc la section mathématique de mon cerveau que le tabouret avait atteint précédement.

Tel un zombi surchargé, je reprend pour la deuxième fois le chemin dans le sens exigé. tachant de ne pas me faire remarquer malgré le sang qui coule de mes oreilles.

Après quelques minutes, oh miracle, un raccourci s'offre enfin à ma vue ! Ni une ni deux, mais trois secondes plus tard, me voilà passant ce portail magique pour me retrouver.... à la section cuisine à nouveau...

Le temps de me retourner, le raccourci avait disparu. Je remarche pour la troisième fois cette allée, suivant mes propres traces de sang et les complétant par des larmes.

Escaliers, babioles, cartons. Je m'écroule devant ma copine allongée sur un fauteuil jardin qui m'accueille d'un "c'est pas trop tôt" et s'empresse d'emmener les affaires à la caisse.

Je m'entends à peine marmonner à la caisse lorsque l'on me demande si je désire un crédit sur cinq, dix ou trente ans pour payer mes achats.

Je tente un sursaut d'énergie pour arriver au snack, hélas fermé depuis dix bonnes secondes et seul un rire sadique des clients se goinfrant de hot dogs masque mes gémissements.

Penaud, je ne paye aucune attention au retour du bus. Seuls les craquements de mes os parviendront à me distraire lorsque je ramènerai les affaires de l'arrêt à l'appartement.

Arrivé enfin chez moi, tremblant, je pose les trois sacs bleus par terre, ne sachant lequel ouvrir en premier.

Ma copine déjà allongée sur le canapé, se repose brièvement en feuilletant le catalogue Ikea amoureusement ramené dans son sac à main.

Soudain elle se jette sur moi en me le collant sous le nez :

"Bon sans, c'est ça qu'il nous fallait pour l'entrée ! Il faut qu'on y retourne demain !"

Mes yeux se posent sur un long meuble blanc qui provoque effroi et tremblements dans tout mon corps.

"Hors de question, je n'irais pas demain !"

"Mais, pour l'entrée..."

"J'ai dit non !"

Longue engueulade, que le sommeil parvient heureusement à conclure. Nuit agitée, de sombres cauchemars où des monstres mi hommes mi placards m'attaquent et m'attachent à un porte manteaux pour me flageller à coups de housses de matelas. Hélas, c'était du nylon et j'y suis allergique, raison pour laquelle ce rêve était des plus déplaisants.

Un bruit de porte me réveille. Il est 10 heures du matin et ma compagne est déjà partie acheter ce foutu meuble.

Quelques  heures plus tard je la vois rentrer, deux sacs bleus sous les bras, mais sans meuble.

"C'était trop lourd pour moi, je n'y arrive pas toute seule. Il faut que l'on y retourne la semaine prochaine !"

Bon sang... je crois bien que je n'y échapperais pas...

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