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lundi, octobre 24, 2005

Free in my head

Des jours que j'étais enfermé dans cette foutue clinique.
Le docteur Faltroux s'en était donné à coeur joie avec moi.
Déstabilisé, immobilisé par des sangles, j'étais une parfaite proie pour ses expériences mentales et autres études sur subconscient déficient humain.

Les séances s'enchaînaient à une fréquence irrégulière et m'avaient fait perdre toute notion du temps, de la réalité et de li'irréalité

Me voilà à nouveau dans une de ces salles obscures du sous-sol, à subir ce tocard qui use de son pouvoir de petit chef, m'humilie et se lance dans de longs plaidoyers interminables qui brillent par leur manque d'originalité et une aigreur symptomatique de la part de cet être ...

"Vous n'êtes rien d'autre qu'un abruti de junkie !"
Et c'est reparti. L'infirmière planquée derrière la console de contrôle n'écoute même plus, un baladeur mp3 lui permet enfin d'échapper au côté pénible de son boulot : écouter les discours de son supérieur.

"Vous vous accrochez à la moindre dépendance, même insignifiante, pour combler vos frustrations dûes à des désirs inassouvis par vos incapacités latentes"
Commence à me saouler le monsieur là !

"Vous n'êtes rien, poussière insignifiante tâchant l'image de notre société, fruit pourri d'une génération perdue et dégénérée, cloporte boursouflé d'ingratitude à l'égard de vos aînés bienfaisants. Souillure, ce serait trop d'honneur pour vous qualifier. Vous seriez incapable d'assumer le plus minime des paradoxes qui vous caractérise".
Je crois que c'est un signal pour que je mette fin à ses jours.

J'admets, au début, ses messages avaient de l'effet sur moi.
Il savait toucher là où il fallait pour provoquer des crises de nerfs et des ruptures faciles. Cris, pleurs, lamentations, supplications pour qu'il arrête, il avait là de quoi jouir et se sentir supérieur. Le désir de pouvoir tant caractéristique des nabots.

Pas de chance pour lui, les infirmiers qui me traitaient les autres jours étaient plus cléments et plus objectifs. En les écoutant attentivement j'avais appris à repérer mes défauts, tels que ma gentillesse trop apparente et donc trop facilement accessible, mes piqûres de dope directement au coeur et mes quelques névroses chroniques.
J'avais ainsi repéré et appris à maîtriser un peu ces défauts, suffisamment en tout cas pour me blinder.

Suffisamment pour mieux encaisser ses attaques.

Suffisamment pour réagir.

Il en veux du jeune qui assume ses paradoxes ? Il va en avoir.

Depuis peu j'avais compris que les liens qui me fixaient au siège étaient dans ma tête. Très astucieux comme système, bloquer le patient mentalement. Assez efficace en fait, mais il suffit que le prisonnier découvre la supercherie pour ne plus être captif. Je peux faire disparaître ces foutus liens à tout moment, je l'ai déjà expérimenté. Les gens ne s'en rendent même pas compte, et c'est bien là-dessus que je compte.

C'est bien mon grand, approches-toi.

Oui, souffles-moi tes injures avec ton haleine fétide.

Tu te rapproches, trop petite proie innocente.

Tu es à moi !

J'ouvre les yeux, et mes liens disparaissent.

Je me redresse d'un coup et ,je l'embrasse, sur la bouche.
Comme je m'y attendais, passé la première surprise, il se laisse prendre au jeu de mes lèvres pulpeuses et commence à apprécier, au point même d'introduire sa langue dans ma bouche.

C'est là que le sacrifice des doigts de mon dentiste n'aura pas été vain. Grâce à ça, j'ai développé une méthode rapide et efficace de taillade à coup de dents. Avant même qu'il puisse réaliser quoi que ce soit, sa langue se retrouver sectionnée.

L'assistante se met à hurler derrière son pupitre pendant que son chef horrifié et interloqué reste bloqué sur lui-même, ne sachant que faire.

Je recrache le bout de langue sur l'assistante, qui s'évanouit sur le champ.

Pour le docteur Faltroux, rien à faire, il agonise lentement sur son siège, toujours abasourdi par ce qu'il lui est arrivé.

Quelques minutes suffisent pour qu'il ne soit plus de ce monde. Étonnamment je n'éprouve rien, ni joie ni peine.

Reste maintenant à s'échapper sans trop attirer le regard.
Voyons, je suis en camisole avec du sang autour de la bouche, qu'est-ce qui pourrait paraître louche aux yeux des gardes...

Bon, ok, vais piquer la blouse et le masque de l'assistante.

LOL, moi qui avait toujours cru que c'était un gag le coup des infirmières nues sous la blouse.
Pas le temps, je dois partir le plus vite possible d'ici.

Les couloirs sont vides. Parfait.

Monter les escaliers.

Pousser la porte.

Avancer de cinquante mètres.

Là, à droite. Cette porte. Celle de la liberté. Je le sais, je le sens. Mon instinct tout entier bourdonne en mon être intérieur et m'éclaire de cette vérité vraie que je ne peux ignorer. La force de l'évidence, je la sens flamboyante, je peux fermer les yeux, éteindre mes sens, aucune erreur ne se peut, la sortie est là, en franchissant ce seuil maudit.

Bip, Bip

"Aaaah, Infirmière, vous tombez bien, on avait besoin d'aide, on vient de recevoir ce grave accidenté de la route. Vite, bougez-vous, c'est une urgence".

Merde c'est pas vrai. Me voilà en plein bloc opératoire à devoir aider des chirurgiens ! C'est l'hallu. Je ne vais jamais tenir sans vomir.

Bon, surtout ne pas regarder le type. Oh mon dieu, j'ai regardé. Vite, vite, inspirer, expirer, inspirer, expirer. C'est pas vrai, c'est plus un humain, c'est une compression de César le type.

Bon, les autres chirurgiens n'ont pas encore grillé la supercherie. Peut-être qu'en prétextant une pause clope je pourrais sortir...

"Infirmière, pouvez-vous nous dire si l'un des organes vitaux est touché ?"
"Non c'est bon, à priori les couilles n'ont rien."
"..."

Et mince, je crois bien que je me suis fait repérer là.

Bon, a priori le type avait bien quelques soucis puisque son électrocardiogramme ressemble maintenant au profil de Jane Birkin nue sous le soleil tropical de Londres.

Les médecins m'encerclent, perplexes.
Cette situation est légèrement angoissante, à la limite de l'anxiogène profond. C'est assez embarrassant, et je ne sais vraiment pas comment m'en sortir.

A moins que...

CHABITTE ! ! ! !


Ah non, ce n'est toujours pas cette situation qui peut être débloquée de cette manière...

Bon, tant pis, je commence à les frapper tous, visant le plexus pour couper leur souffle puis les yeux pour les aveugler et enfin un bon coup pour les assommer.

Hé hé, qu'est ce que tu veux toi avec ton scalpel, tu crois que c'est avec ça que tu vas me fiare mal ?

Ouch !

Ok, il m'a cherché lui : Tacle à la carotide, insertion des doigts dans les côtes et fulguro-poing dans les valseuses. Non mais oh !

Bon, un des docs semble encore conscient. J'en profite pour lui demander la sortie. Tourner à gauche au lieu de tourner à droite comme j'ai fait.

Très astucieux, les écrits "Issue de secours" et "salle d'opération" n'avaient donc pas été inversé pour feinter l'ennemi. Décidément très très malins les gérants de cette clinique.

Je cours, gravi les marches de l'escalier quatre par quatre.

Les chiens n'ont même pas le temps de capter ma présence que je suis déjà hors de leur portée.

Je sors par le portail. Reprend mes forces et me retourne.

Plus de clinique.

Que dois-je en conclure ? Que mon esprit va mieux puisque ce lieu sorti de mon imaginaire semble disparu ?

Peut-être. Le mystère demeure en tout cas.

Sifflotant et déambulant dans les rues, me voilà retournant tranquillement vers mon appartement, prêt à affronter les épreuves banales de la vie quotidienne.

Quoi que, des fois la vraie vie sait se montrer aussi imprévisible que dan mon esprit tordu !

Mais ça, c'est pour d'autres aventures ;)